Alexandre et Kaiser đŸ“· âœ…

Au Bord Du Monde, le livre

[ Texte en cours d’Ă©criture, repassez dans quelques heures… ]

10/01/2013 France / Paris Portrait d’Alexandre, sans-abri, et de son chien Kaiser. Il raconte sa vie d’orphelin dĂ©posĂ© dans un sac-poubelle devant une Ă©glise lorsqu’il Ă©tait nourrisson. Ce soir, il dormira aux pieds de Notre-Dame, sous les ponts de Paris. Photographie prise lors du tournage.
Les Ă©diteurs de livres d’art Cohen&Cohen
 Nouveau lien internet vers le livre : https://www.cohen-cohen.fr/pages/detail.php?id=18
Sylvain Leser / Le Pictorium 12/12/2012 France / Ile-de-France / Paris Alexandre, 43 ans, depuis 15 ans vit dans la rue. Cela fait une semaine qu’il s’est installe dans ce quartier, sous le pont Charles de Gaulle, non loin de la gare d’Austerlitz.

Un soir de grand froid, il faisait bien – 12° au sol, oĂč nous tournions Wenceslas au viaduc d’Austerlitz, dont je vous reparlerai bientĂŽt, j’avais laissĂ© Claus dans cet entre-deux, pour aller aux alentours rencontrer d’autres personnages pour le film « Au Bord Du Monde ». Lorsque je dis entre eux, ce n’est pas juste : j’installe la camĂ©ra pour le cadre intuitivement choisi, Nicolas branche le son et lui reste sans bouger
 Ă  tout entendre.

Puis je prends quelques distances pour ne pas dĂ©ranger cette intimitĂ©, l’échange se passe entre Claus et la personne. Ce soir je me rappelle avoir Ă©tĂ© chercher des chocolats chauds juste avant la fermeture de la buvette de la Gare, puis de m’ĂȘtre Ă©loignĂ© et d’avoir rencontrĂ© Alexandre sous le pont National. Il a tout de suite acceptĂ© de participer Ă  cette aventure, celle de nous dĂ©crire son monde, la rue, sa vision du monde


Les personnes qui vivent lĂ  dehors si on leur porte de l’attention en passant du temps avec eux se sentent parfois en confiance et nous livrent avec authenticitĂ© qui elles sont et ce qu’elles ont envie de nous raconter. Ces paroles sont prĂ©cieuses. Le tĂ©moin est trĂšs souvent le bienvenu lorsqu’une chose anormale se passe. Les journalistes, les photographes vous le diront, mĂȘme Ă  la guerre les victimes et les combattants ont besoin d’eux pour le dire au monde entier. LĂ  pourtant ce n’est pas la guerre mais la survie, qui laisse d’ailleurs ces personnes avec le mĂȘme besoin, celui peut ĂȘtre de crier sa vĂ©ritĂ©, son coup de gueule, son dĂ©sespoir ou autre, en tout cas d’ĂȘtre entendu, vu et reconnu. De ne plus ĂȘtre seul Ă  porter un fardeau. De diluer sa misĂšre. D’ĂȘtre aidĂ©.

Qu’on le raconte avec eux, pour eux, pour nous, pour les autres
 Sait-on jamais ? quelqu’un entendra et fera un pas vers l’autre, c’est tout ce qui compte je crois. Je ne me rappelle plus si nous avons commencĂ© Ă  le filmer ce soir lĂ , ou si c’était la nuit suivante. Nous sommes revenus vers lui plusieurs dizaines de fois tout au long de cette annĂ©e, lĂ  sous le pont, sous celui de Notre Dame, dans des parkings et je l’ai revu par la suite Ă  divers soupes nocturnes. On a continuĂ© de parler. Il a vu le film, en Ă©tait trĂšs Ă©mu et fier, mais pareil je ne me rappelle plus dans quelle salle il l’a vu, nous en discutions tous deux Ă  la sandwicherie qui est juste en face de l’Église Saint-Leu Saint-Gilles qui sert des petits dĂ©jeuners Ă  deux pas de Saint-Eustache, qui sert le souper aux sans abri. Dans le quartier des Halles.

Une vie de vagabond Ă  Paris et Ă  la campagne, rat des villes et rat des champs m’avait-il racontĂ©, il avait vĂ©cu chez le Gitan en forĂȘt et s’en Ă©tait enfui la trouille au ventre. Une vie Ă  la Zola Ă  la Hugo. Je ne sais pas ce qu’il est devenu depuis
ni lui ni son vieux chien Kaiser. Rappelons nous ses paroles qui nous causent avec ses mots d’un monde de technologie qui avance et des hommes qui rĂ©gressent comme Ă  l’époque des dinosaures


Sylvain Leser / Le Pictorium 11/02/2013 Portrait d’Alexandre, Jonathan et le chien Kaiser, ce sont deux sans-abris qui vont dormir sous les arcades du Louvre de Paris, comme des dizaines d’autres SDF. The homeless of Paris Monuments.
QuatriĂšme de couverture
Il y a des images dans la vie de chacun d’entre nous qui pĂ©nĂštrent au plus profond de nos Ăąmes. C’est le cas de celles proposĂ©es par le film bouleversant de Claus Drexel et les photographies de Sylvain Leser qui en sont issues. Ils donnent la parole aux sans-abri qui un Ă  un viennent Ă  notre rencontre.

Ce documentaire multi-primĂ©, encensĂ© par la presse – offert avec cet ouvrage dans le format Blu-Ray – rĂ©vĂšle la dignitĂ© magistrale de ces laissĂ©s-pour-compte.

Photographiés dans la nuit de Paris, la majesté des personnes renvoie à la magnificence des lieux.

Comme le relĂšve si sensiblement ValĂ©rie Bajou dans son magnifique ouvrage de rĂ©fĂ©rence consacrĂ© Ă  Courbet (Courbet. La vie Ă  tout prix, 2019, Cohen&Cohen Ă©diteurs) :

« Le pittoresque ne suffit pas Ă  expliquer ces oeuvres dont la signification politique est Ă©vidente. Courbet a cherchĂ© la marge de la sociĂ©tĂ© qu’il aurait pu ignorer. Son tĂ©moignage dĂ©nonce, forcĂ©ment. Comme aujourd’hui la sociĂ©tĂ© libĂ©rale ne peut nĂ©gliger ceux qu’elle abandonne en chemin. Mais s’ils Ă©chappent difficilement aux regards, ils se fondent dans l’anonymat. RepĂ©rĂ©s « au bord du monde Â» en plein Paris par Claus Drexel, en 2014, presque invisibles pour ceux qui ne veulent pas voir ni savoir, quelques sans-abri prennent la parole et offrent la profondeur de leurs souffrances et de leur solitude. Les sĂ©quences saisissent de vĂ©ritables portraits de ces femmes et de ces hommes, Christine ou Pascal, sans le sentimentalisme pĂ©nible et politiquement correct. La puissance ne vient pas seulement des tĂ©moignages, mais plutĂŽt de l’absence de morale. Les personnages sortent de la marge avec prosaĂŻsme, vĂ©hĂ©mence, parfois avec modestie. Les mots Ă©voquent l’inquiĂ©tude et les Ă©preuves, les petites joies, les regards de ceux qui se dĂ©tournent. Par plans fixes, avec lenteur et puissance, passant avec la mĂȘme attention de la splendeur des monuments Ă  l’hĂ©tĂ©roclite des abris de fortune, l’image accentue le contraste inouĂŻ entre la ville des lumiĂšres et la dĂ©tresse nocturne. Â»

Ce blog n’est pas ce que vous trouverez dans le livre, c’est un moyen pour moi de parler d’eux Ă  nouveau. Parfois de raconter ce qu’ils deviennent et mes pensĂ©es du moment face Ă  mes souvenirs de cette pĂ©riode oĂč j’arpentais Paris la nuit, avant et aprĂšs le film. LĂ , ils sont plus seuls que jamais : se sont-ils habituĂ©s, sont-ils Ă  l’abri, ont-ils trouvĂ© de la nourriture, de l’eau de la chaleur, dans la merde ? Avez-vous achetĂ© le livre ? Avez vous vu le film ? Cela fera un an qu’il est paru d’ici quelques jours, je devais leur amener, je ne l’ai pas encore fait, j’ai arrĂȘtĂ© d’aller les voir au dĂ©but de l’annĂ©e 2018. Je n’en pouvais plus, j’étais cramĂ© d’épuisement, j’avais trop donné  trop d’annĂ©es Ă  cavaler dans les rues la nuit Ă  faire tout mon possible pour ceux avec qui j’avais crĂ©Ă© un lien fort


Aujourd’hui comme cette nuit oĂč j’écris cela, ils me manquent, je pense fort Ă  eux et comme je sais qu’à chaque fois que je reparle de tout ça, les gens vont me demander des nouvelles d’Henri, eh bien l’autre soir Claus me ramenait Ă  la maison par le pĂ©riphĂ©rique et j’ai scrutĂ© les bas cĂŽtĂ©s et j’ai repĂ©rĂ© la couche fraĂźche de l’ami, elle n’a pas son pareil, donc je le sais vivant et libre comme il le souhaite. Nous ne sommes pas Ă©gaux devant la pollution, il est vivant. Cela fait 36 ans je crois Ă  prĂ©sent qu’il vit aux portes du nĂ©ant, dans la poussiĂšre vraiment monstrueuse et des particules lourdes des freins de bagnoles, des tunnels et des axes routiers sordides, ultra bruyant, dans l’insalubritĂ© la plus totale
mais au chaud, la tempĂ©rature y est quasi constante, hiver comme Ă©tĂ©. Je suis rassurĂ© pour lui, il s’en sort dans ce monde parallĂšle au notre. LĂ  ou nous ne survivrions pas nous mĂȘmes.

Nos chers Ă©diteurs Ă  qui revient l’idĂ©e et la rĂ©alisation de cet ouvrage, un opus, versent une somme d’argent aux Ɠuvres de la Mie de Pain, qui je le sais font un travail exceptionnel depuis toujours mais plus particuliĂšrement depuis le dĂ©but de cette crise inouĂŻe qui frappe les plus fragiles. Il est disponible en ligne depuis le premier jour, le film est inclus avec le livre, vous en avez pensĂ© quoi d’ailleurs🙂 ?

Mort de Froid
On Ă©prouve toujours un cadavre…
Ce sans-domicile fixe de 45 ans a été retrouvé mort de
froid ce matin Ă  Paris, sous le pont Charles-De-Gaulle (dans le
XIIe arrondissement). Sylvain Leser / Le Pictorium – 13/12/2012 .
Le mĂ©decin du Samu a constatĂ© le dĂ©cĂšs du quadragĂ©naire, qui est, selon lui, mort d’hypothermie.
https://www.parismatch.com/Culture/Cinema/Au-bord-du-monde-la-critique-545217 âŹ‡ïžŽLa critique de Paris Match Ă  la sortie du film en salles en janvier 2014.
Ne manquez pas ce documentaire choc sur les sans-abris qui survivent Ă  Paris.
Paris, la nuit. C’est ici que vivent Jeni, Wenceslas, Christine, Pascal et d’autres. Sans-abri, ils hantent trottoirs, ponts et couloirs du mĂ©tro, au bord d’un monde oĂč la sociĂ©tĂ© ne protĂšge plus. Ils nous font face, ils nous parlent.
La critique

Quand le soleil Ă©teint sa lumiĂšre, que les automobiles rejoignent leurs terriers horodatĂ©s et que la foule s’évapore dans les immeubles haussmanniens, Paris s’éveille enfin. La Seine, mĂ©tamorphosĂ©e en riviĂšre de diamants noirs, se glisse comme un bas de soie sous les jambes des ponts. Sous les projecteurs, les façades des monuments jouent les stars dans leurs plus beaux drapĂ©s architecturaux. Plus lumineuse que le jour, la capitale n’est jamais aussi belle qu’en robe du soir. Mais sous les ors, prĂšs des ordures, dans les pĂ©nombres vivent des ombres. On les appelle les clochards, les SDF, les sans-abri. Un Roumain en quĂȘte d’assimilation se dissimule dans les tĂ©nĂšbres d’une pile de pont. Un philosophe Ă©clairĂ© se calfeutre dans la coquille de toile d’une tente. Une mĂšre Ă©plorĂ©e, l’ñme enchaĂźnĂ©e Ă  la grille du Jardin des Plantes, se stratifie sous les couches de couvertures enfilĂ©es les unes sur les autres. AlignĂ©s dans leurs sacs de couchage, telles les victimes d’un crash aĂ©rien, des hommes sarcophages se fondent avec le sol.
Seuls quelques rats visitent leur sommeil de pierre. Un chanceux s’est fait un chez-soi de cartons. Un flic lui a mĂȘme livrĂ© un gueuleton pour son NoĂ«l
 Dans la chaleur des nuits d’étĂ©, sous les pluies battantes de l’automne, dans les frimas hivernaux, Claus Drexel a placĂ© sa camĂ©ra Ă  hauteur d’homme assis, en tendant son micro comme une main Ă  prendre. Avec un contraste poĂ©tique, il pose leur misĂšre sur l’écrin d’un Paris de carte postale. GrĂące Ă  Sylvain Leser, le chef opĂ©rateur, jamais la ville n’a Ă©tĂ© si bien filmĂ©e. Exceptionnel, ce documentaire bouleversant nous force Ă  regarder et Ă  Ă©couter ceux que l’on ne veut plus voir, tant ils nous renvoient Ă  notre impuissance et Ă  nos propres angoisses. Bien sĂ»r, le rĂ©alisateur a soignĂ© son casting, Ă  part le spectre de Robinson CrusoĂ© qui hante le tunnel des Champs-ElysĂ©es, et la drĂŽle de mĂšre Ubu au doux dĂ©lire, trĂŽnant dos Ă  l’Arc de Triomphe, tous s’expriment avec luciditĂ© dans un français d’acadĂ©micien. Loin de nous jeter leur dĂ©tresse au visage, c’est leur dĂ©sarroi face Ă  une sociĂ©tĂ© qui les nie et les renie que ces ĂȘtres « au bord du monde » nous communiquent avec des mots justes. Juste des mots, mais quelles Ă©motions !
Les Ă©diteurs de livres d’art Cohen&Cohen
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